Lettres Circulaires

Décret n°2004-760 du 28 juillet 2004 relatif à la réforme de la médecine du travail

Fait à Paris, le mardi 28 septembre 2004

Référence : 032-04
Émetteur : Direction des Relations du Travail
Destinataires :

Mesdames, Messieurs les Directeurs des organismes de Sécurité sociale

Mesdames, Messieurs les Médecins-conseils régionaux

Le décret n°2004-760 du 28 juillet 2004 relatif à la réforme de la médecine du travail et modifiant le code du travail, publié au journal officiel du 30 juillet 2004, modifie de façon substantielle le statut du médecin du travail et, notamment, les règles régissant la périodicité de la visite médicale, le mode de calcul du temps médical et la procédure de licenciement du médecin du travail.

Vous trouverez ci-joint, une note technique sur le dispositif réglementaire ainsi mis en place.

Réforme de la médecine du travail

La périodicité de l'examen médical

Examens médicaux périodiques : tous les 2 ans

Désormais, la visite médicale s'effectue tous les 24 mois, contre tous les ans auparavant (article R.241-49 du code du travail).

Surveillance médicale renforcée : au moins une fois par an

Aux termes de l'article R.241-50 du code du travail, le médecin reste juge de la fréquence et de la nature des examens que comporte cette surveillance particulière, mais, ces examens sont renouvelés au moins annuellement, sous réserve de dispositions particulières prévues par les règlements pris en application de l'article L.231-2 2°.

Ces dispositions concernent :

  • Les salariés affectés à certains travaux comportant des exigences ou des risques déterminés par des règlements pris en application de l'article L. 231-2 (2°) ou par arrêtés du ministre chargé du travail.

(ex : les salariés qui travaillent sur écran lorsqu'ils utilisent de façon habituelle et pendant une partie non négligeable du temps de travail des équipements à écran de visualisation, Décret n°91-451 du 14 mai 1991).

  • Les salariés qui viennent de changer de type d'activité ou d'entrer en France, pendant une période de dix-huit mois à compter de leur nouvelle affectation, les travailleurs handicapés, les femmes enceintes, les mères d'un enfant de moins de deux ans, les travailleurs âgés de moins de dix-huit ans.

Examens supplémentaires :

Auparavant, seul le salarié pouvait bénéficier sur demande, d'une visite auprès du médecin du travail.

Le Décret étend le champ d'application de ces dispositions à l'employeur et, protège le salarié de toute sanction lors de visites effectuées auprès du médecin du travail.

Ainsi, l'article R.241-49 du code du travail souligne que : « tout salarié bénéficie d'un examen médical à la demande de l'employeur ou à sa demande. Cette dernière demande ne peut motiver une sanction ».

Indépendance

L'indépendance du médecin est garantie dans l'ensemble de ses missions (article R.241-30 du code du travail).

Nomination du médecin du travail

Le médecin du travail ne peut être nommé qu'avec l'accord soit du comité d'entreprise ou du comité d'établissement, soit du comité inter-entreprises ou de la commission de contrôle du service inter-entreprises.

Dans les services inter-entreprises administrés paritairement, le médecin du travail ne peut être nommé qu'avec l'accord du conseil d'administration.

Cette consultation doit intervenir au plus tard avant la fin de la période d'essai qui suit l'embauche.

A défaut d'accord, la nomination ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail prise après avis du médecin inspecteur régional du travail et de la main-d'œuvre.

A l'occasion de cette embauche, l'effectif des salariés suivis par le médecin nommé ainsi que, dans les services inter-entreprises, la liste des entreprises surveillées ou, dans les services d'entreprise, le secteur défini par l'entreprise auquel le médecin du travail est affecté sont communiqués au comité d'entreprise ou d'établissement ou aux organismes de contrôle mentionnés à l'article R. 241-14. Ces données sont mises à jour annuellement.

Changement d'affectation

La procédure relative à la nomination du médecin s'applique désormais :

  • dans les services d'entreprise ou d'établissement, en cas de changement de secteur d'un médecin du travail lorsqu'il est contesté par l'intéressé ou, selon les cas, par le comité d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par les délégués du personnel de l'établissement que le médecin du travail avait précédemment en charge ;

  • dans les services inter-entreprises de santé au travail, en cas de changement d'affectation à un médecin du travail d'une entreprise ou d'un établissement, ainsi qu'en cas de changement de secteur d'un médecin du travail, lorsque ces changements sont contestés par le médecin du travail, par l'employeur ou, selon les cas, par le comité d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par les délégués du personnel de l'entreprise ou de l'établissement que le médecin du travail avait précédemment en charge.

A défaut d'accord des instances consultées, ou le cas échéant de l'employeur, les changements mentionnés aux deux alinéas précédents ne peuvent intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail délivrée après avis du médecin inspecteur régional du travail et de la main-d’œuvre.

Un document annuel faisant état de ces changements, ainsi que des autres changements d'affectation d'une entreprise ou d'un établissement de plus de cinquante salariés, est tenu à disposition de l'inspecteur du travail, du directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ainsi que du médecin inspecteur régional du travail et de la main-d’œuvre.

Licenciement (article R. 241-31-2 du code du travail)

Le Décret introduit des dispositions semblables aux dispositions en vigueur pour les représentants du personnel.

Application de la procédure de droit commun, préalable à l'audition du médecin

L'entretien prévu à l'article L.122-14 précède ainsi la consultation du comité d'entreprise, d'établissement ou, le comité inter-entreprises ou la commission de contrôle du service inter-entreprises ou, dans le cas des services inter-entreprises administrés paritairement, le conseil d'administration, instances qui ne peuvent se prononcer qu'après audition de l'intéressé.

  • Consultation et vote

L'article R.241-31-3 du code du travail souligne que l'instance compétente doit se prononcer, par un vote à bulletin secret, à la majorité de ses membres, régulièrement convoqués, présents ou représentés ; chaque membre ne peut disposer du pouvoir que d'un seul autre membre.

  • La demande d'autorisation de licenciement formée auprès de l'inspecteur du travail

La demande d'autorisation de licenciement est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'inspecteur du travail dont dépend le service de santé au travail où est employé l'intéressé.

Cette demande énonce les motifs du licenciement envisagé ; elle est accompagnée du procès-verbal de la réunion du comité ou de la commission de contrôle.

La demande est présentée dans les quinze jours suivant la délibération du comité ou de la commission de contrôle.

  • Instruction et décision concernant la demande d'autorisation

L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le médecin du travail peut, sur sa demande, se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel du service de santé au travail ou de l'entreprise.

L'inspecteur du travail statue dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter de la réception de la demande motivée présentée par l'employeur ; il ne peut être prolongé que si les nécessités de l'enquête le justifient.

La décision de l'inspecteur est motivée. Elle est notifiée à l'employeur, au médecin du travail et au comité ou à la commission de contrôle par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur ou du médecin du travail.

Ce recours doit être introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur ce recours vaut décision de rejet.

  • Dans le cas d'une mise à pied, les délais susvisés sont ainsi décomptés

  • la consultation du comité ou de la commission de contrôle a lieu dans un délai de dix jours à compter de la mise à pied.

  • la demande d'autorisation de licenciement auprès de l'inspecteur du travail est présentée dans les quarante-huit heures suivant la délibération du comité ou de la commission de contrôle.

  • l'inspecteur du travail statue dans un délai huit jours à compter de la date de la demande.

Relations avec les représentants du personnel

Le service de santé au travail communique à chaque employeur concerné, les rapports et les résultats des études du médecin du travail portant sur son action en milieu de travail.

Il revient à l'employeur de porter ces rapports à la connaissance du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, des délégués du personnel (article R.241-47 du code du travail).

Temps consacré par le médecin du travail à sa mission en milieu de travail

  • Instauration d'un forfait

Le médecin du travail doit toujours consacrer le tiers de son temps de travail à sa mission en milieu de travail (rapport annuel d'activité, plan d'activité transmis au CHSCT, fiche d'entreprise ...).

Toutefois, ce temps est désormais forfaitisé (article R. 241-47 du code du travail) et doit correspondre :

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Remplacement

L'article R. 241-32-1 prévoit désormais que toute absence de médecin du travail d'une durée supérieure à trois mois fait l'objet d'un remplacement.

Mise en place de plafonds pour les médecins en service de santé au travail

Dans les service de santé inter-entreprises, le groupe d'entreprises ou d'établissements confié à chaque médecin du travail, en application des dispositions de l'article R. 241-28, est déterminé, après prise en compte du temps consacré à l'action en milieu de travail tel que défini à l'article R. 241-47, par

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Ces plafonds, correspondant à un médecin à temps plein, appliqués à un médecin du travail à temps partiel, sont calculés au prorata du temps de travail.

Dans les services de santé au travail d'entreprise ou d'établissement, le secteur d'entreprise confié à chaque médecin du travail, en application des dispositions de l'article R. 241-28, est déterminé en fonction d'un effectif de salariés suivis conformément aux dispositions ci-dessus.

Critères de mise en place d'un service de santé au travail autonome ou inter-entreprises (article R. 241-2 du code du travail) :

Jusqu'à présent le critère retenu par le code du travail pour l'adoption d'un service de santé au travail (autonome ou, inter-entreprises) était le temps minimal que le médecin devait consacrer à son activité pour l'entreprise.

Désormais, l'employeur doit mettre en place un service de santé au travail en référence aux effectifs de salariés placés sous surveillance médicale ou, par rapport aux nombre d'examens médicaux pratiqués.

Il convient de rappeler que les entreprises qui ne disposent pas d'un service de santé d'entreprise ou d'établissement ou inter‑établissement restent tenues d'organiser un service de santé au travail inter-entreprises ou d'adhérer à un tel service (article R.241-10-1 du code du travail).

  • Mise en place d'un service de santé au travail d'entreprise ou d'établissement'

Un service de santé au travail d'entreprise ou d'établissement doit être mis en place lorsque :

  • soit l'effectif de salariés placés sous surveillance médicale, atteint ou dépasse les deux tiers du plafond de 3300, cité ci-dessus ;

  • soit le nombre d'examens médicaux pratiqués atteint ou dépasse les deux tiers du plafond de 3200, cité ci-dessus.

Ce service peut être mis en place lorsque

  • soit l'effectif de salariés placés sous surveillance médicale, dépasse le huitième du plafond de 3300, cité ci-dessus ;

  • soit le nombre d'examens médicaux pratiqués dépasse le huitième du plafond de 3200, cité ci-dessus.

Ces dispositions entreront en vigueur un an à compter de leur publication pour les services de santé au travail existant à la date de cette publication, soit le 30 juillet 2005.

  • Mise en place d'un service inter-établissement

Un service de santé au travail inter-établissements peut être créé entre plusieurs établissements d'une entreprise, lorsque :

  • soit l'effectif de salariés placés sous surveillance médicale, dépasse le huitième du plafond de 3300, cité ci-dessus

  • soit le nombre d'examens médicaux pratiqués dépasse le huitième du plafond de 3200, cité ci-dessus

  • Service de santé pour les unités économiques et sociales

Un service de santé commun peut être institué lorsque l'effectif des salariés suivis ou, le nombre d'examens médicaux pratiqués dépasse la moitié des plafonds précités (article R.241-6 du code du travail).

  • Service de santé au travail pour les établissements travaillant sur un même site et appartenant à des entreprises différentes.

Le code du travail permet désormais, lorsque ces établissements ont conclu un accord de coopération pour la mise en œuvre des mesures de prévention relatives à la santé et à la sécurité de leurs salariés de créer un service de santé au travail.

La création de ce service est autorisée par le Directeur de la DDTEFP après consultation des comités d'entreprise ou d'établissements visés et, lorsque l'effectif des salariés suivis ou le nombre d'examens médicaux pratiqués atteint les deux tiers des plafonds susvisés.

Contrôle des services inter-entreprises

Le comité inter-entreprises (mis en œuvre lorsque plusieurs entreprises créent un service de santé au travail inter-entreprises) et la commission de contrôle (constituée à la diligence du président du service de santé au travail inter-entreprises) sont désormais sollicités :

  • lors du recrutement de médecin en contrat à durée déterminée ;

  • sur le recrutement ou le licenciement des personnes employées en qualité d'intervenants en prévention des risques professionnels ;

  • lors de tout changement d'affectation à un médecin d'une entreprise ou d'un établissement de plus de 50 salariés.

Enfin, les membres du la commission de contrôle se réunissent au moins 3 fois par an (contre deux ans auparavant) l'ordre du jour devant être communiqué à l'inspecteur du travail et au directeur régional du travail de l'emploi et de la formation professionnelle. Ils bénéficient également de la formation nécessaire à l'exercice de leur mandat.